Délibération n° 83-81 du 28 avril 1983 portant sur la réglementation archivistique en Polynésie française
TITRE Ier – Dispositions générales
Article 1er.- Les archives sont l’ensemble des documents, quels que soient leur date, leur forme et leur support matériel, produits ou reçus par toute personne physique ou morale, et par tout service ou organisme public ou privé dans l’exercice de leur activité. La conservation de ces documents est organisée dans l’intérêt public tant pour les besoins de la gestion et de la justification des droits des personnes physiques ou morales, publiques ou privées, que pour la documentation historique de la recherche.
Art. 2.-Tout fonctionnaire ou agent chargé de la collecte ou de la conservation d’archives en application des dispositions de la présente délibération est tenu au secret professionnel en ce qui concerne tout document qui ne peut être légalement mis à la disposition du public.
TITRE II -Les archives publiques
Art. 3.-Les archives publiques sont : 1°) les documents qui procèdent de l’activité de l’administration du territoire, des établissements et entreprises publics ; 2°) les documents qui procèdent de l’activité des organismes de droit privé chargés de la gestion des services publics ou d’une mission de service public ; 3°) les minutes et répertoires des officiers publics ou ministériels. Les archives publiques, quel qu’en soit le possesseur, sont imprescriptibles. Les conditions de leur conservation sont déterminées par arrêté du conseil de gouvernement prévu à l’article 28 de la présente délibération.Art. 4.-A l’expiration de leur période d’utilisation courante par les services, établissements et organismes qui les ont produits ou reçus, les documents visés à l’article 3 font l’objet d’un tri pour séparer les documents à conserver et les documents dépourvus d’intérêt administratif et historique, destinés à l’élimination. La liste des documents destinés à l’élimination ainsi que les conditions de leur élimination sont fixées en accord entre l’autorité qui les a produits ou reçus et le service des archives.
Art. 5.-Lorsqu’il est mis fin à l’existence d’un service, établissement ou organisme détenteur d’archives publiques, celles-ci doivent être, à défaut d’une affectation différente déterminée par l’acte de suppression, versées à l’administration des archives.
Art. 6.-Les documents dont la communication était libre avant leur dépôt aux archives publiques continueront d’être communiqués sans restriction d’aucune sorte à toute personne qui en fera la demande. Les documents visés à l’article premier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal demeurent communicables dans les conditions fixées par cette loi. Tous les autres documents d’archives publiques pourront être librement consultés à l’expiration d’un délai de trente ans ou des délais spéciaux prévus à l’article 7 ci-après.
Art. 7.-Le délai au-delà duquel les documents d’archives publiques peuvent être librement consultés est porté à : 1°) Cent cinquante ans à compter de la date de naissance pour les documents comportant des renseignements individuels de caractère médical ; 2°) Cent vingt ans à compter de la date de naissance pour les dossiers de personnel ; 3°) Cent ans à compter de la date de l’acte ou de la clôture du dossier pour les minutes et répertoires des notaires ainsi que pour les registres de l’enregistrement ; 4°) Cent ans à compter de la date du recensement ou de l’enquête, pour les documents contenant des renseignements individuels ayant trait à la vie personnelle et familiale et, d’une manière générale, aux faits et comportements d’ordre privé, collectés dans le cadre des enquêtes statistiques des services publics ; 5°) Soixante ans à compter de la date de l’acte pour les documents qui contiennent des informations mettant en cause la vie privée ou intéressant la sûreté de l’État.
Art. 8.-Sous réserve, en ce qui concerne les minutes des notaires, des dispositions de l’article 26 du décret n° 57-1002 déterminant le statut du notariat en Polynésie française, l’administration des archives peut autoriser la consultation des documents d’archives publiques avant l’expiration des délais prévus aux articles 6, alinéas 3, et 7 de la présente délibération. Cette consultation n’est assortie d’aucune restriction, sauf disposition expresse de la décision administrative portant autorisation. Par dérogation aux dispositions du premier alinéa du présent article, aucune autorisation ne peut être accordée aux fins de permettre la communication, avant l’expiration du délai légal de cent ans, des renseignements visés au 4° de l’article 7 de la présente délibération.
TITRE III – Les archives privées
Art. 9.-Les archives privées sont l’ensemble des documents définis à l’article 1erqui n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 3 ci-dessus.
Art. 10.-Lorsque le territoire et les collectivités locales reçoivent des archives privées à titre de don, de legs, de cession, de dépôt révocable ou de dation au sens de la délibération n° 178 du 18 octobre 1978, l’administration dépositaire est tenue de respecter les conditions de conservation et de communication qui peuvent être mises par les propriétaires.
Art. 11(remplacé, Del n° 84-71 du 7/06/1984, art. 1er) nouveau.- Les archives privées présentant pour des raisons historiques un intérêt public peuvent être classées comme archives historiques, sur proposition de la commission territoriale des archives, par arrêté du conseil de gouvernement. La commission territoriale des archives est organisée par arrêté du conseil de gouvernement. A défaut du consentement du propriétaire, le classement peut être prononcé d’office par arrêté du conseil de gouvernement. Le déclassement peut être prononcé soit à la demande du propriétaire, soit à l’initiative de la commission territoriale des archives ; la décision de déclassement est prise dans les mêmes formes que la décision de classement, sous réserve des dispositions de l’article 21, deuxième alinéa, de la délibération n° 83-81 du 28 avril 1983.
Art. 12.-Le classement de documents comme archives historiques n’emporte pas transfert au territoire de la propriété des documents classés.
Art. 13.-L’administration des archives notifie immédiatement au propriétaire l’ouverture de la procédure de classement. A compter de cette notification, tous les effets du classement s’appliquent de plein droit. Ils cessent de s’appliquer si une décision de classement n’est pas intervenue dans les six mois suivant la date à laquelle le propriétaire a accusé réception de la notification.
Art. 14.-Les archives classées comme archives historiques sont imprescriptibles. Les effets du classement suivent les archives, en quelques mains qu’elles passent. Tout propriétaire d’archives classées qui procède à leur aliénation est tenu de faire connaître à l’acquéreur l’existence du classement.
Art. 15.-Toute destruction d’archives classées est interdite. Toutefois, par dérogation à l’alinéa précédent, lorsqu’il apparaît, lors de l’inventaire initial du fonds, que certains documents sont dépourvus d’intérêt historique, il peut être procédé à leur élimination dans les conditions prévues à l’article 4, deuxième alinéa, de la présente délibération en accord entre le propriétaire du fonds et le service des archives.
Art. 16.-Sauf autorisation du service des archives, les archives classées ne peuvent être soumises à aucune opération susceptible de les modifier ou de les altérer. Les propriétaires ou possesseurs d’archives classées sont tenus, lorsqu’ils en sont requis, de les représenter aux agents accrédités du service des archives.
Art. 17.-Le propriétaire d’archives classées qui projette de les aliéner est tenu de notifier son intention au service des archives.
Art. 18.-Le classement peut donner lieu au paiement d’une indemnité représentative du préjudice pouvant résulter, pour le propriétaire, de la servitude de classement d’office. La demande d’indemnité est produite dans les six mois à compter de la notification de l’arrêté de classement. A défaut d’accord amiable, l’indemnité est fixée par les tribunaux de l’ordre judiciaire.
Art. 19.-Tout officier public ou ministériel chargé de procéder à la vente publique d’archives privées, ayant ou non fait l’objet d’une décision de classement, doit en donner avis a service des archives au moins quinze jours à l’avance et accompagne cet avis de toutes indications utiles sur ces documents. Cet avis précise l’heure et le lieu de la vente. L’envoi d’un catalogue avec mention du but de cet envoi tiendra lieu d’avis. En cas de vente judiciaire, si le délai fixé au paragraphe précédent ne peut être observé, l’officier public ou ministériel, aussitôt qu’il est désigné pour procéder à la vente, fait parvenir au service des archives les indications ci-dessus énoncées.
Art. 20.-S’il l’estime nécessaire à la protection du patrimoine d’archives, le territoire, par l’intermédiaire du service des archives, après avis d’une commission territoriale des archives, doit exercer, sur tout document d’archives privées mis en vente publique, un droit de préemption par l’effet duquel il se trouve subrogé à l’adjudicataire. Le territoire exerce également ce droit à la demande et pour le compte des établissements publics, des communes et des fondations. En cas de demandes concurrentes, un arrêté du conseil de gouvernement détermine le bénéficiaire.
Art. 21.-Le propriétaire qui projette d’exporter des archives classées doit solliciter préalablement l’autorisation du territoire. Il adresse à cette fin au service des archives une demande comportant un état des documents dont il envisage l’exportation. Le service des archives est tenu d’accuser réception de la demande immédiatement. Dans le même délai, le service des archives peut : 1°) – Soit notifier au propriétaire sa décision de subordonner l’autorisation d’exporter à la reproduction préalable de tout ou partie des archives classées proposées à l’exportation, dans les conditions prévues à l’article 22 ci-dessous. 2°) – Soit faire connaître au propriétaire son intention d’exercer un droit de rétention sur tout ou partie des archives proposées à l’exportation ; dans ce cas, il est procédé dans les formes et conditions prévues à l’article 23 ci-dessous.
Art. 22.-Dans le cas prévu par le 1°) de l’article 21 de la présente délibération, le service des archives fixe les modalités de reproduction des archives classées dont l’exportation a été demandée par le propriétaire, les opérations de reproduction doivent être achevées sauf accords amiables entre les parties dans les deux mois qui suivent la réception, par le service des archives, de la demande prévue à l’alinéa premier du même article. Les reproductions exécutées dans ces conditions sont communiquées aux tiers dans les conditions prévues pour la communication des archives privées originales. Leur consultation est subordonnée à l’accord du propriétaire. Si ce dernier n’est pas connu, elle n’est autorisée qu’à l’expiration d’un délai de cent ans à compter de la date de l’exportation. Toutefois, ces restrictions sont supprimées de plein droit si la communication des documents originaux dans le pays d’importation n’est pas soumise à des limitations analogues.
Art. 23.-S’il l’estime nécessaire à la protection du patrimoine d’archives, le territoire, après avis de la commission territoriale des archives, doit exercer par l’intermédiaire du service des archives, un droit de rétention, au prix fixé par l’exportateur, sur les archives classées proposées à l’exportation. Ce droit peut être exercé pendant une période de six mois à compter de la notification de la réponse du territoire visé à l’article 21, alinéa 2. Il est pris par arrêté du conseil de gouvernement. Le territoire exerce également ce droit à la demande et pour le compte des établissements publics, des communes, et des fondations qui le demandent. En cas de demandes concurrentes, un arrêté du conseil de gouvernement détermine le bénéficiaire.
Art. 24.-L’exportation des archives privées qui présentent un intérêt public pour des raisons historiques et qui n’auraient pas fait l’objet d’une décision de classement est subordonnée à l’autorisation du conseil de gouvernement. Cette autorisation est accordée dans le délai d’un mois à partir de la déclaration en douane souscrite par l’exportateur. A défaut de réponse dans le même délai, l’autorisation est considérée comme tacitement accordée. Pendant ce même délai d’un mois, le territoire après avis de la commission territoriale des archives, peut exercer le droit de rétention mentionné à l’article 23 de la présente délibération. Art. 25.-L’administration détentrice d’archives publiques ou privées est tenue de motiver tout refus qu’elle oppose à une demande de communication de documents d’archives.
Art. 26.-Après avis de la commission territoriale des archives, le service des archives peut, sur autorisation du conseil de gouvernement, obtenir la communication et le micro-filmage de toute archive privée présentant un intérêt public d’ordre historique, culturel ou juridique dans les conditions de classement prévues à l’article 11.
TITRE IV – Dispositions pénales
Art. 27.-Sans préjudice de l’application des articles 173, 254 et 439 du code pénal, toute personne qui, à la cessation de ses fonctions aura, même sans intention frauduleuse, détourné des archives publiques dont elle est détentrice à raison de ces fonctions, sera punie d’une peine d’emprisonnement de un jour à deux mois et d’une amende de 5 000 F à 50 000 F ou de l’une de ces deux peines seulement ; en outre, les tribunaux de l’ordre judiciaire pourront condamner le délinquant à la confiscation ou à la restitution des archives sous astreinte.
Art. 28.-Toute infraction aux dispositions des articles 14, 15, 16, 17, 19, 21 – premier alinéa – et 24 ci-dessus, est passible d’une amende de 30 000 F à 500 000 FCP conformément aux dispositions prévues à l’article 46 – troisième alinéa – de la loi n° 77-772 du 12 juillet 1977 relative à l’organisation de la Polynésie française.
TITRE V – Dispositions diverses
Art. 29.-Les modalités d’application des titres Ier – II – III de la présente délibération sont fixées par arrêtés pris en conseil de gouvernement.
Art. 30.-Le conseil de gouvernement est chargé de l’application de la présente